Un lieu idéal pour apprendre !

Parmi les décisions que nous prenons pour nos enfants, celle qui consiste à choisir un lieu pour apprendre nous préoccupe beaucoup.
En effet, la scolarité est encore pour certains d’entre nous un moyen de trouver sa place dans une société qui s’avère de plus en plus compétitive.

Nous cherchons l’école publique la plus accueillante, ou l’école alternative qui correspondra à nos valeurs, peut-être une école privée sous contrat avec l’État qui respectera notre budget et offrira un compromis. Tous les parents ne choisiront pas l’école pour l’instruction de leurs enfants, certains se lanceront dans l’aventure de l’école à la maison, ou du unschooling.

Je me suis parfois demandé si l’on ne pouvait pas établir un parallèle entre le fait de choisir un lieu pour apprendre et un lieu pour faire naître son enfant.
Pour la naissance, j’ai appris que peu importe le lieu, ce sont les conditions d’une naissance physiologique qui sont essentielles. Ces dernières peuvent être respectées à la maison, mais aussi à l’hôpital ou en maison de naissance.
Même si le domicile des parents semble le plus adapté, la naissance peut également y être entravée, si j’en crois certains témoignages : trop de monde autour de la mère en travail ou une ambiance conviviale qui ne se prête pas au respect de l’intimité peuvent entraîner un ralentissement de la progression du bébé qui veut venir au monde.

Pénombre, calme, chaleur et présence auprès de la mère d’une personne dans l’acceptation inconditionnelle sont très propices à une naissance rapide et sans difficulté.
Connaître les conditions qui favorisent la naissance peut nous donner beaucoup d’espoir quand le fait d’accoucher à domicile nous inquiète peut-être, nous ou notre compagne/compagnon.
Finalement, il suffit d’aller négocier ces conditions dans le lieu où nous nous sentons en sécurité pour donner naissance.

La naissance est un événement unique dans la vie d’un être humain, alors que l’apprentissage se fait continuellement. Nous avons longtemps cru, tout comme pour la naissance d’ailleurs, que l’intervention autoritaire d’un expert était nécessaire. Et que l’usage de punitions et de récompenses permettrait aux enfants d’apprendre un programme imposé par une institution décisionnaire.

Pas d’apprentissage sans enseignant et sans pédagogie, et ce depuis que l’instruction est obligatoire !
Si les connaissances acquises à l’école sont assez vite oubliées, ce qui ne l’est pas, en revanche, ce sont les conditions de cet apprentissage.
Nous pensons que tout apprentissage doit se faire avec un certain niveau de contraintes. Des contraintes, à l’école, nous en avons subi beaucoup. Se lever le matin très tôt pour être à l’heure, obéir aux injonctions de l’enseignant, peu importe si le sujet nous intéresse ou pas, ne pas poser trop de questions, accepter d’être évalué en cours d’acquisition des connaissances, rester assis pendant de longues heures sans pouvoir bouger, ne pas pouvoir parler et échanger avec les autres jeunes, etc.

Parfois nous avons le sentiment que nous avons échoué et qu’il nous aurait fallu travailler plus, et c’est alors ce que nous allons exiger de nos enfants et des enseignants qui les  accompagnent: plus de devoirs, de travail, d’efforts. Et quand nous avons eu la chance de tirer notre épingle du jeu dans l’institution scolaire, nous la rendons responsable de notre réussite, et bien entendu elle devient complètement incontournable pour nos enfants.

Et si les moyens choisis par l’école étaient responsables de notre échec, et si nous avions réussi en dépit de ses propositions ?

Depuis plus de quinze ans, les neurosciences ont fait leur entrée dans le monde de l’éducation. Elles ont apporté une autre vision de l’apprentissage en complétant les apports des autres sciences cognitives.
Nous savons comment les enfants apprennent de façon optimale. Le lieu ne devrait pas entrer en ligne de compte, mais nous pourrions évoquer les conditions qui respectent le jeune apprenant dans ses découvertes, ses explorations et son désir d’apprendre.

En voici quelques-unes :
● Le stress n’est pas compatible avec l’apprentissage. Les évaluations, notes ou humiliations, dues à une méconnaissance du fonctionnement du cerveau, amenuisent peu à peu notre désir d’apprendre.
● Le système de la carotte et du bâton (psychologique) utilisé en classe a un énorme impact sur notre capacité à apprendre tout au long de notre vie. Nous avons en effet tendance à ne plus agir sans récompense ou menace de punition. La procrastination est un fléau qui pourrait trouver sa cause dans les méthodes de l’éducation traditionnelle.
● Connaître le fonctionnement de son cerveau est une donnée essentielle pour apprendre.
● L’intelligence n’est pas une donnée fixe, elle évolue constamment avec les apprentissages, les réflexions, les discussions.
● Nous pouvons tout apprendre, il suffit pour cela d’avoir une motivation suffisante. Quand nous apprenons par nécessité ou par plaisir, l’apprentissage est très efficace.
● Apprendre en groupe semble être la forme de travail la plus riche et laplus dynamique.
● Apprendre se fait lorsque l’on a la sécurité suffisante pour le faire. Grâce à une relation affective soutenante, nous parvenons à prendre des risques, à explorer notre monde pour le comprendre, car nous savons que notre base arrière est assurée par un adulte aimant.
● On pourrait qualifier l’apprentissage de besoin physiologique. Nous ne cessons jamais d’apprendre, et nous avons le plus souvent un grand plaisir en le faisant.

L’apprentissage se fait à partir du moment où nous venons au monde…
Pour nos enfants, au moment de choisir un lieu pour apprendre, nous pouvons essayer de nous poser des questions, en voici quelques exemples :
● Instruction en famille
Quel est mon objectif en déscolarisant mon enfant ? Faire mieux que l’école ? Respecter ses besoins et son rythme ? Ai-je travaillé sur mon histoire d’élève ?
● École alternative
Cette école est-elle compatible avec mes valeurs ? Respecte-t-elle les conditions de l’apprentissage optimal? Mon budget me permet-il cette inscription sans mettre en péril la vie de la famille ?
● École publique
Si j’étais inscrit dans cette école, aurais-je envie d’y passer mes journées ? Les enseignants peuvent-ils être des figures d’attachement pour mes enfants ? Le projet d’établissement
prend-il en compte les sciences cognitives et leurs apports ?

Bonne rentrée à tous !

Catherine Dumonteil Kremer
PEPS n°30